Le parcours tennistique d’un ancien du circuit

Patrice GRUETPortraits1 Commentaire

C’est à Aulnay-sous-Bois, dans les locaux de la Ligue de Seine-Saint-Denis (93) que nous accueille Sébastien Louis, ancien joueur de haut-niveau (-30) et fraîchement diplômé d’ un DEJEPS Tennis avec l’ACFT/Trans-Faire.
Souriant et honnête, le natif de Villepinte (93) répond à nos questions et revient sur son parcours tennistique atypique, son choix, sa formation et ses ambitions, le tout sans regrets, ni langue de bois.

Parcours tennistique, circuit pro ou coach?

Bonjour Sébastien. Une petite présentation pour commencer


J’ai 29 ans, je suis actuellement joueur et enseignant au TC Villemomble. J’ai été formé, enfant, au club de Rosny (93) et été joueur du Blanc-Mesnil (93). J’ai été classé -30.

Peux-tu retracer ton parcours tennistique jusqu’à ton entrée en formation ?


J’ai été pris en charge dans les structures de ligues puis fédérales, pôles France de Reims puis Grenoble. Ensuite, à 18 ans, j’ai dû m’organiser par moi-même et avec la structure de la ligue de Seine-Saint-Denis car je n’ai pas été retenu au C.N.E.
J’ai fait, alors, trois ans de circuit « Future » mais j’ai compris que je ne m’étais pas donné les moyens de réussir au plus haut-niveau.

« Croyez-moi, savoir utiliser Powerpoint ou des outils de gestion, c’est un plus pour le haut-niveau! »Sébastien Louis

Qu’est-ce qui a fait dans ton parcours tennistique que tu n’as pas accédé au haut-niveau ?


Comme beaucoup de jeunes, je pense que j’avais le talent, mais pas la capacité de travail nécessaire. C’est ce qui fait la différence d’après moi. C’est le travail au quotidien qui fait le résultat.
A mon avis, on est très « chouchouté » en France. Il faut être à 300 % en permanence ce qui est très dur. J’ai pris la décision d’arrêter à 21 ans et de devenir entraineur.

21 ans, c’est très jeune pour prendre une telle décision ?


Oui, c’est très jeune mais j’ai eu la chance d’entrer dans une structure privée, l’Académie Mouratoglou, pour ne pas la nommer, où on m’a aidé à me former. Patrick lui-même, pour sa vision du tennis, et ses cadres qui m’ont aidé énormément.
J’ai aussi été à ce moment-là, « sparring » de très bons joueurs (Dimitrov, Serena…).
Dans mon parcours tennistique, cette expérience m’a permis d’approcher le haut-niveau qui est très différent de la vie de club « normal ». J’ai eu des conseils théoriques et j’ai pu pratiquer avec des niveaux très divers pendant les stages, aussi bien des enfants que des adultes, mais de manière intensive.

Sébastien Louis, son parcours tennistique
Enzo (gauche) et Sébastien (droite) en mode déterminé’

Ensuite, tu es parti sur le circuit comme entraîneur?


Oui, avec Enzo, qui avait 14 ans, pendant quatre ans qui est monté « promo » et son meilleur classement à ce jour a été environ  200e ATP. J’ai pu faire tous les Grands Chelems juniors avec lui ainsi que des Challengers et Futures. Ca m’a fait voyager dans le monde entier et surtout j’avais la responsabilité de sa carrière. Je lui organisais par exemple ses plannings, ses budgets… Suivre un seul joueur, c’est l’idéal.

Suite de ton parcours, tu es revenu en club, à Villemomble (93) ?

J’ai entraîne les joueurs du club et ensuite j’ai joué pour le club et on a remonté le club en National. Je m’occupe actuellement de deux joueurs dans le cadre du Tennis Club de Villemomble qui sont des espoirs sérieux, Tom Jomby et Mick Lescure. Et d’un tout jeune qui a aussi de bonnes qualités et un fort potentiel. J’entraîne également un joueur sous convention à la ligue de Seine Saint Denis.

« J’incite tous les jeunes à aller au moins jusqu’au au bac, car on ne sait jamais »Sébastien Louis

Ton parcours tennistique actuel se tourne vers le haut-niveau et le circuit pro ?


J’ai travaillé en club et ça me plait mais ce qui me passionne vraiment c’est d’accompagner les joueurs le plus haut possible. Par contre, le circuit pro est passionnant mais aussi très contraignant avec des voyages plus ou moins lointains toute l’année. Par rapport à une vie de famille, cela demande beaucoup de sacrifices.

Actuellement, je suis heureux d’accompagner des joueurs de haut-niveau dans leur progression mais je ne serai pas toujours aussi disponible pour être en permanence sur le circuit. Je cherche le bon compromis entre le haut-niveau et la vie de famille mais il faut savoir aussi que le circuit Future par exemple est très dur à vivre. Il est même plus dur que le grand circuit ATP dont les conditions d’accueil et de jeu n’ont rien à voir.

Maintenant, passons à l’aspect « formation D.E », que t’a-t-elle apporté ?


Pour moi cela m’a appris un autre métier, complètement différent de ce que je connaissais par le haut-niveau. Gérer un groupe d’enfants ou d’adultes sur le terrain, apprendre à construire un projet club. Cela m’a remis en question complètement et cela m’aide à être mieux structurer avec mes joueurs. Croyez-moi, savoir utiliser un PowerPoint ou des outils de gestion, c’est un plus au haut-niveau!
J’ai appris à être plus rigoureux avec la technique et les mots de la technique. Ne serait-ce que pour connaitre le nom des prises, par exemple. Et aussi gérer un groupe d’initiation et de perfectionnement.

Je suis plus sûr de moi avec des groupes comme le mini-tennis ou les adolescents loisirs. Je pense que je peux désormais m’en sortir avec n’importe quel public ce qui n’était pas le cas avant la formation.

Justement, comment cela t’a fait progresser dans ta pratique d’entraineur de haut-niveau ?


C’est une remise en question permanente dans notre métier. On découvre toujours des choses et comme le jeu évolue tout le temps, il faut être capable de se remettre en question. C’est ce qui est beau dans notre métier. On sait tout de suite si on a été bon ou pas à ce titre les évaluations nous permettent de progresser.

« Il faut aider les parents, si le père ou la mère est isolé, l’enfant est tiraillé entre l’entraineur et la famille »Sébastien Louis

Qu’est-ce qui pourrait, selon toi, être amélioré dans la formation ?


J’ai trouvé que pendant cette année, nous n’étions pas suffisamment sur le terrain. Mais cela est logique dans la mesure où, je pense que la formation, c’est surtout « comment gérer un club ».

Les UC1&2 du diplôme demandent beaucoup de travail en salle et cela se comprend. Mais bien sûr, personnellement, étant avant tout homme de terrain, j’aime y être le plus souvent  possible.

N'essayez même pas de le déconcentrer
N’essayez même pas de le déconcentrer

Comme il faut couvrir l’ensemble de l’activité du moniteur de club, n’est-ce pas logique d’insister sur la gestion ?


Oui, bien sûr, mais quand on est, comme moi, principalement entraîneur de haut-niveau, on aimerait pouvoir passer plus de temps sur le terrain. Peut-être, un peu plus de technique et de physique aurait été le bienvenu.

Ton niveau tennis qui est bien supérieur au niveau moyen des autres stagiaires, fait que tu attendais autre chose ?


Justement, non. J’ai été très intéressé de comprendre comment fonctionne l’apprentissage des petits enfants au tennis. J’avais l’impression que ça n’avançait pas quand j’étais en situation avec eux. Et puis j’ai compris que cela était lent, plus lent que je ne pensais. Et j’ai vu que les choix pédagogiques sur les balles, le terrain, influaient énormément sur le résultat. A mon sens, c’est pour cela qu’une  mise en pratique plus régulière des apports théoriques sur le terrain pourrait s’avérer utile

Au final, ne regrettes-tu pas de ne pas avoir été joueur professionnel ?


Absolument pas, ma passion c’est le tennis et je le pratique chaque jour! Pour être franc, j’ai en fait vite compris que je n’étais pas fait pour être pro…

Quand tu t’apercevras qu’un jeune qui a des ambitions n’aura pas les capacités, quelles qu’elles soient, de devenir joueur professionnel, quelle sera ta réaction ?


Je ne leur dirai jamais d’arrêter car c’est une décision qui leur appartient, mais par contre je leur dirai que ça va être dur et que ce n’est pas  sûr qu’ils y arrivent. Mais de continuer, c’est leur décision.

Après, j’ai le regret de ne pas avoir passé le bac et j’inciterai tous les jeunes à aller au moins jusqu’au bac, car on ne sait jamais. Nous avons un rôle d’éducateur, très très important. On est un peu leur conseiller, et on a la possibilité d’être écouté. Maintenant, cela relève de la décision du jeune et de ses parents de poursuivre l’aventure tennis. Mais j’encouragerai toujours les jeunes à continuer leurs études jusqu’au bac.

Que penses-tu des « projets familiaux » avec un père qui se transforme en entraîneur ?


On peut être là pour les aider. A l’Académie, on a eu de nombreux cas, et je pense qu’il faut aider les parents dans le parcours tennistique de leurs enfants. Dans l’idéal, tout le monde tire dans le même sens. Si le père ou la mère est isolé, l’enfant est tiraillé entre l’entraîneur et la famille.

Tu as toujours des contacts avec l’Académie Mouratoglou ?


Oui, et je serai toujours reconnaissant vis-à-vis de Patrick de ce qu’il a fait pour moi. Comme il est prêt à aider les gens passionnés,  il reste toujours disponible et à l’écoute. Il a un parcours tennistique exceptionnel, ça sera toujours mon «boss»…

Merci, Sébastien, pour ta disponibilité et pour la sincérité de tes réponses.

Entretien réalisé par Jean-Paul Pestre le 20 octobre 2015 à la ligue SSD à Aulnay-sous-Bois.


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